Marsaxlokk, avec son port pittoresque, est l’un des joyaux de Malte. C’est ici que vous rencontrerez toute une flotte de luzzi mouillant dans le port. Le luzzu, bateau de pêche traditionnel à l’œil d’Osiris peint sur la proue, est une survivance de l’époque phénicienne de Malte.

Plongeons dans l’histoire détaillée de ce lieu, une histoire façonnée par les peuples anciens, les envahisseurs étrangers, et la mer Méditerranée elle-même.

L’Époque Préhistorique et Antique

L’histoire de Marsaxlokk remonte à la préhistoire. Les premières traces d’habitation datent de l’âge du bronze, avec des fouilles archéologiques révélant des vestiges de structures et d’objets de cette période.

Approfondissons l’histoire de Marsaxlokk pendant les époques phénicienne, carthaginoise, romaine et byzantine.

L’Époque Phénicienne et Carthaginoise

Marsaxlokk était un site important pendant la période phénicienne (800 av. J.-C.).
Les Phéniciens semblent avoir été les premiers à utiliser largement la baie de Marsaxlokk.
Les archéologues estiments qu’ils ont établi une colonie ici vers le 9ème siècle av. JC. Ils ont également construit un temple à Tas-Silġ, dédié à la déesse de la fertilité Astarté [précisions sur Tas-Silġ en fin de cet article (1)] . L’activité maritime de Marsaxlokk a commencé à cette époque, devenant un carrefour commercial clé pour les Phéniciens.

Avec le déclin des Phéniciens vers 480 av. J.-C., les Carthaginois, ont pris le contrôle de Malte et, par conséquent, de Marsaxlokk.

L’Époque Romaine

L’ère romaine a commencé en 218 av. J.-C. lorsque Malte est devenue une province de la République romaine après la Deuxième Guerre punique. Le port de Marsaxlokk a continué à prospérer sous le contrôle romain, en servant de port de pêche et de commerce.

L’Époque Byzantine

La domination romaine a pris fin au Vème siècle, avec la chute de l’Empire romain d’Occident, mais Malte a continué à faire partie de l’Empire romain d’Orient, également connu sous le nom d’Empire byzantin.

Bien que moins d’informations soient disponibles sur l’utilisation de Marsaxlokk pendant l’époque byzantine, il est probable que le port ait continué à être utilisé pour la pêche et le commerce. Des fragments de céramique et des pièces de monnaie byzantines trouvés à Marsaxlokk témoignent de l’occupation continue du site pendant cette période.

Ces époques anciennes ont façonné Marsaxlokk, laissant un riche héritage culturel et archéologique qui continue de passionner les chercheurs aujourd’hui.
L’ère post-byzantine est également une période fascinante de l’histoire de Marsaxlokk et de Malte en général.

Après la domination byzantine, Malte a connu une série de conquêtes par diverses puissances européennes et nord-africaines. Et, la baie de Marsaxlokk constituant la baie la plus large de Malte, rien d’étonnant que dans son histoire, elle ait été la cible de fréquents raids et attaques de pirates et pillards d’origines diverses.

Les Arabes et l’influence islamique

Au IXème siècle, les Aghlabides, une dynastie arabe d’Afrique du Nord, ont conquis Malte.
C’est durant cette période que la culture et la langue maltaises ont subi des influences arabes substantielles. Bien qu’il n’y ait pas beaucoup de traces archéologiques spécifiques de l’occupation arabe à Marsaxlokk, l’influence arabe est palpable sur tout l’archipel maltais.

L’ère Normande

En 1091, le comte normand Roger Ier de Sicile a conquis Malte. Sous les Normands, Malte a été réintégrée dans le monde chrétien occidental après plusieurs siècles de domination islamique. C’est au cours de cette période que l’île a commencé à être gouvernée en conjonction avec la Sicile, une pratique qui s’est poursuivie pendant plusieurs siècles.

En ce qui concerne Marsaxlokk, la pêche est restée une activité importante, et la baie de Marsaxlokk a continué à servir de port pour le commerce et les communications avec le reste de la Méditerranée.

Du Moyen Âge à l’arrivée des Chevaliers

Malte est ensuite passée sous le contrôle des Hohenstaufen (1194), des Angevins (1266), des Aragonais (1283), puis des Espagnols (1412).
Pendant tout ce temps, Marsaxlokk et son port stratégique ont continué à prospérer.

Au cours du XVème siècle, la piraterie en Méditerranée a commencé à augmenter, ce qui a entraîné des perturbations dans la vie maritime de Marsaxlokk.
Cet environnement plutôt chaotique a finalement conduit l’Empereur Charles Quint à céder Malte (en fief) aux Chevaliers de Saint-Jean, en 1530. Ce qui valut au port de Marsaxlokk de nouvelles incursions.

L’ère de l’Ordre de Saint-Jean

L’histoire de Malte et de Marsaxlokk en particulier a pris un tournant important avec l’arrivée de l’Ordre de Saint-Jean en 1530.
L’importance stratégique de Marsaxlokk était connue des Ottomans. Tournant dramatique en 1565, lorsqu’une partie de la flotte ottomane se présente dans la baie ; y ancrant nombre de navires avant l’attaque qui devint Le Grand Siège de Malte.
En 1614, l’Ordre a choisi Marsaxlokk comme site pour la Forteresse Saint-Luc (1614 – appelée aussi Tour St-Luc) ; une tour de garde bastionnée qui faisait partie d’une série de fortifications érigées par les Chevaliers pour protéger l’île des invasions ottomanes.

En dehors des aspects militaires, les Chevaliers ont également eu une influence sur l’industrie de la pêche à Marsaxlokk. Ils ont encouragé la pêche en octroyant des droits et des privilèges aux pêcheurs, en construisant des infrastructures portuaires et en important des techniques de pêche innovantes d’autres parties de la Méditerranée. Ainsi, l’époque des Chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean a laissé une empreinte durable à Marsaxlokk.

La brève Période française

L’invasion française de Malte en 1798, menée par Napoléon Bonaparte lors de sa campagne vers l’Égypte a eu des répercussions spécifiques sur Marsaxlokk, compte tenu de son emplacement stratégique.

Le 9 juin 1798, la flotte de Napoléon Bonaparte (près de 400 navires), en route vers l’Égypte pour sa campagne militaire entre à Malte ; afin de sécuriser une base navale importante en Méditerranée. Et Marsaxlokk, avec sa large baie naturelle, était un point d’entrée idéal.

L’invasion a eu un impact direct sur Marsaxlokk. Les Français ont pris le contrôle du port et des installations portuaires de Marsaxlokk, ainsi que de la forteresse Saint-Luc.

L’occupation française a été brève. Après avoir expulsé l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem de l’île en 1798, les troupes françaises furent expulsées à leur tour en 1800 par les Britanniques.
Le passage à l’administration britannique a marqué le début d’une nouvelle phase dans l’histoire de Marsaxlokk, qui deviendra un port important de l’Empire britannique.

La Période Britannique

« La plupart des pêcheurs qui travaillaient dans la baie de Marsaxlokk étaient originaires de Żejtun, faisant des allers-retours depuis le rivage. Vers 1846, les premières maisons ont commencé à être construites à Marsaxlokk, alors que les pêcheurs de Żejtun s’y installaient définitivement. » – Source : Wikipedia

Avec l’arrivée des Britanniques en 1800, Marsaxlokk est devenu une base navale importante. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le port a joué un rôle crucial en fournissant un point d’arrivée pour les convois d’aide qui ont aidé l’île à survivre au terrible siège des forces de l’Axe.

Depuis l’Indépendance de Malte

Après des siècles de domination étrangère, l’île a enfin obtenu le droit de se gouverner elle-même, ce qui a entraîné de nombreux changements et développements.

Dans le cadre du nouvel État indépendant, Marsaxlokk a continué à prospérer en tant que centre de pêche, préservant son riche héritage maritime. Avec l’indépendance, le gouvernement maltais a cherché à diversifier et à renforcer l’économie de l’île ; avec notamment la construction d’un port franc dans la baie de Marsaxlokk. Cette installation de transbordement majeure, a stimulé l’économie locale autour de Marsaxlokk et Birzebbuga ; créant des emplois et augmentant le commerce maritime.

Marsaxlokk aujourd’hui

Marsaxlokk est devenu l’un des principaux centres de pêche de l’île, une tradition qui se perpétue encore aujourd’hui. Dans la baie de Marsaxlokk de nos jours, l’activité portuaire est toujours d’importance.

• Marsaxlokk est aujourd’hui le plus grand port de pêche des îles maltaises (env. 70% de la flotte de pêche maltaise y est basée).
• Dans la baie de Marsaxlokk, une zone portuaire franche est dédiée au transport de conteneurs : Kalafrana, Malta Free Port (au sud du port de Marsaxlokk, en activité depuis 1988).

Parallèlement au développement industriel, Marsaxlokk est une destination touristique populaire. Cette localité a su équilibrer le modernisme et la tradition, le développement économique et la préservation de son patrimoine ancien (dont le site archéologique de Ta-Silg qui fait l’objet de constants travaux de conservation).

Cet article est un complément à :
« Marsaxlokk, pittoresque village de pêcheurs« ,
Description de Marsaxlokk d’aujourd’hui, avec PHOTOS.

Note (1) Tas-Silġ – Le site de Tas-Silġ (au nord-est du village de Marsaxlokk), est un témoin de cultes religieux pour plusieurs civilisations, dont les Phéniciens, les Carthaginois, les Romains, et les Byzantins.

• A la Préhistoire : « Site sanctuaire couvrant toutes les époques du néolithique (au IVe siècle après JC). Le site de Tas-Silġ comprend des vestiges mégalithiques, des édifices dispersés appartenant à trois temples distincts. » – Source Wikipédia
• A l’époque phénicienne : construction d’un temple dédié à la déesse de la fertilité Astarté.
• A l’époque carthaginoise de Malte (env. 480 av. J-C), le culte de la déesse Tanit, divinité carthaginoise, s’est intégré au site de Tas-Silġ.
• A l’époque romaine, le site de Tas-Silġ a connu des changements significatifs, avec le temple phénico-punique réaménagé en sanctuaire romain. Les fouilles archéologiques ont révélé des statues en marbre et des preuves de pratiques religieuses romaines, y compris des offrandes d’animaux.
• Sous les Byzantins, le christianisme est devenu la religion dominante, et Tas-Silġ a été transformé en une basilique chrétienne.
• Sous les Normands, on pense que le site de Tas-Silġ a continué à être utilisé, probablement en tant que site religieux chrétien, bien que les détails précis soient rares.